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JUSTICE LEAGUE : GODS AND MONSTERS - Without warning !

Démarche intéressante et soudaine de la part de DC et Warner de lancer comme ça, sans prévenir, sans plan-marketing forcément apparent, un « Elseworld », une version modifiée de quelques personnages phares issus d'univers parallèles (- ce qui en format comics avait donné de très belles variations, comme le Batman-vampire de Kelley Jones, ou le Batman-steampunk de Mike Mignola) et de le lancer ainsi en pâture au public, laissant les petites têtes blondes se demander pourquoi les héros qu'ils connaissent sont maintenant des mêchants, et pourquoi il faudrait s'intéresser à eux ?


Gods and Monsters nous présente en effet un futur alternatif où la Justice League opère de façon autoritaire et brutale pour le compte du gouvernement américain concernant tout ce qui relève du maintien de l'ordre, bien que ce dernier n'aie pas vraiment d' emprise réelle sur eux. Cet accord tacite de bonne entente et de coopération peut même se renverser à tout moment, et d'ailleurs, au tout début du métrage nos anti-héros en sont à considérer très sérieusement l'option de prendre le pouvoir sur le monde entier afin d'annihiler définitivement toute forme de conflits. L'opinion publique n'étant déjà pas forcément de leur côté, leur statut se voit pourtant menacé par des assassinats en chaîne touchant l'ensemble de la communauté scientifique de pointe, dont les perpétrateurs mystérieux prennent bien soin d'essayer de leur faire porter le chapeau..


Tentative audacieuse de la part des concepteurs disions-nous, mais certainement pas dénuée d'objet : DC et Warner posent ici la première pierre de ce que seront leurs futures productions, et bien que nous retrouvons Bruce Timm aux commandes et dont le savoir-faire n'est certainement plus à remettre en question (puisqu'il est l'investigateur du succès de toutes les séries animées DC/ Warner, et l'une des qualités principales de son travail étant bien qu'il n'a jamais pris le spectateur pour un imbécile) les thématiques se font définitivement plus matures, et les affrontements un brin plus violents. Démarche qui vient juste d'être confirmée par l'annonce au Comic-con de San Diego de la mise en chantier d'un animé d'après The Killing Joke d'Alan Moore et Brian Bolland, un des épisodes les plus sombres qui soit parmi toutes les aventures de Batman.


Gods and Monsters emprunte lui-même déjà beaucoup au scénariste anglais Alan Moore, à sa cultissime mini-série Watchmen, tant pour la dimension sociale du propos (la critique de l'autorité) que pour sa structure narrative : les meurtres mystérieux pour la trame, mais aussi et surtout l'emploi des flash-backs en ce qui concerne le déroulement à proprement dit - la photo de groupe des scientifiques de la promotion Luthor est un éminent clin d'oeil à celle des premiers Minutemen (où Moore avait lui-même emprunté de façon revendiquée au Citizen Kane d'Orson Welles) - et le procédé sera ré-utilisé par la suite de façon très parcimonieuse et progressive au cours du récit, permettant de façon tout à fait efficace à Gods and Monsters de ne pas donner l'impression au spectateur de voir juste plusieurs épisodes de série animée mis bout-à-bout, mais bien d'être confronté à un long-métrage pensé en tant que tel. Tout en éclairant la trame principale du récit, ces flash-backs permettent également de présenter les origines de nos protagonistes – qui ne sont pas tout à fait ceux que nous connaissons, où les auteurs s'amusent avec pertinence de la vaste mythologie que représente l'univers des personnages DC : Superman n'est plus le fils de Jor-El mais du Général Zod ; Batman n'est plus Bruce Wayne mais Kirk Langström (originalement Man-Bat) – et c'est un vrai vampire, qui a vraiment besoin de se nourrir de sang humain ! - et Wonder Woman n'est pas Diana Prince, mais Bekka, un personnage créé par Jack Kirby dans sa gigantesque fresque cosmico-héroïque The Fourth World (véritable pierre angulaire du comic-book) dont la figure la plus emblématique est l'ultra-méchant-antagoniste-entre-tous, Darkseid.


Je ne dis pas non plus que l'emploi du flash-back est révolutionnaire ici en soi (!) mais simplement très très bien géré en ce qui concerne la distillation des informations, ajouté au plaisir que peut prendre le spectateur à observer les libertés qu'on pris les auteurs dans les divers décalages concernant les personnages que l'on connaît, mécanisme « d'inversion » des caractères qui culminera absolument avec le Deus Ex-Machina de toute l'histoire, quand nous sera révélé l'identité de l'éminence grise à l'origine de tous ces schèmes machiavéliques (et-je-pèse-mes-mots!). C'est là où le geek que je suis se mord les doigt, puisque ce rebondissement final est emprunté, lui, au run de Grant Morrison sur Doom Patrol (qui heureusement est enfin disponible dans son intégralité depuis maintenant quelques années, et que je recommande ABSOLUMENT à tout amateur de comic-books s'il est un peu curieux de voir du super-héros mainstream abordé ..différemment) ce qui veut dire que celui-ci ne sera donc pas porté sur les écrans avant un bon petit moment, et pourtant ce n'est pas faute de le mériter.. Ce pourrait être l'objet d'un article en soi, aussi je ne m'y attarderais pas, toutefois si DC adaptait en films ou en série tv sa production issue de la « British Invasion », cela lui permettrait peut-être d'enfoncer un grand coup la coolitude pétaradante de son concurrent Disney-Marvel. N'oublions pas que les années 90 seraient considérées comme la période la plus désastreuse du comic-book mainstream, si ce n'étaient les directions audacieuses entreprises par un petit groupe d'auteurs issus de l'underground anglais et judicieusement récupérés par DC : Neil Gaiman avec The Sandman ; Grant Morrison avec Animal Man et Doom Patrol, et enfin Peter Milligan avec Shade The Changing Man. Tout un panel de personnages tombés dans l'oubli, remis au goût du jour dans l' optique de réitérer le succès du revamp de Swamp Thing par Alan Moore (encore lui) dans les années 80. Ce qui, pour le coup, fût complètement le cas.



(ici un fan-trailer un peu à la Ben10 pour Shade The Changing Man, non dénué de qualités mais encore très loin de ce que la série à offrir – à noter que les couvertures originales étaient réalisées par Brendan McCarthy, le monsieur qui a designé et story-boarder le Fury Road de Georges Miller)


Point de nostalgie déplacée ici, si ces ouvrages formidables ne sont pas encore forcément connus par le grand public, ils n'en demeurent pas moins disponibles et promettent tout du moins des moments de lecture absolument formidables, et réjouissons-nous cependant du premier pas manifeste de DC/ Warner en ce qui concerne sa future ligne éditoriale pour le grand écran, ils n'en ont apparemment pas terminé avec les univers alternatifs (renforcée par le succès récent de la série Multiversity de Grant Morrison, consacrée uniquement aux dimensions parallèles) (ce même Morrison déjà abondamment cité, vient également d'annoncer qu'en plus de ses engagements avec DC, il assurerait un poste d'éditeur pour la revue Heavy Metal, la version anglaise de Metal Hurlant) et le gigantesque éventail de possibilités narratives qu'elles offrent, ni avec la volonté de résolument confronter le lecteur à des thématiques adultes.


Nonobstant2000

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