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Tell me you love me : le cri du corps

C'est en 10 épisodes de 50 minutes que cette série brosse à grands traits la force et les travers de la vie de couple en nous évitant les poncifs habituels et en jouant précisément sur ce que l'on a tous en commun mais que nous ne partageons pas ouvertement : l'intime.

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Pour entrer dans le drame, il faut sortir au plus vite des premiers remous suscités par la question de la véracité des scènes de sexe pour se concentrer sur l'essentiel qui n'est pas justement là où on le pense. Le seul intérêt de ce faux débat est de mettre en valeur l'impact même du réalisme de certaines scènes qui, loin de séduire, suscitent le malaise en ce qu'elles montrent le sexe tel qu'il est, dans une nudité qui met bien en valeur l'aspect accessoire et aseptisé des scènes dites "d'amour" que l'on nous sert à tout va sur nos écrans. Cette polémique nous montre bien en creux que, dans le fond, nous ne voyons pas réellement le sexe en lui-même et, donc, que la mise en scène de l'intime reste avant tout justement la simple sublimation d'un acte qui est plus dérangeant qu'on peut le penser au premier abord. Cela est d'autant plus important qu'une des remarques centrales de la thérapeute (véritable fil conducteur entre les différents protagonistes) est de court-circuiter les fausses représentations du sexe véhiculées par la société, car celles-ci nous obligent constamment à faire retour, sans recul, sur notre propre pratique en la mesurant sous un angle toujours plus ou moins déceptif: suis-je dans la norme? quelle fréquence est le signe d'une vitalité? Et finalement: à quoi mesure-t-on le bonheur d'un couple?



C'est justement ce malaise/fascination autour du sexe qui informe les intrigues à travers le quotidien de quatre couples qui adoptent chacun une posture différente face à cela et qui sont donc autant de faces possibles de cette intimité. Quatre couples qui sont aussi avant tout trois âges de la vie et quatre étapes archétypales d'une relation: le désir des premiers moments / la question de l'enfantement / l'intimité face aux enfants / vieillir ensemble. A chaque stade, une question revient: qu'en est-il du désir?


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Jamie et Hugo constituent la difficulté des départs et la question du choix: pourquoi rester ensemble? Que signifie cette limitation du désir? C'est donc la naissance du couple qui est interrogée dans ce qu'elle a de plus fragile car elle se situe dans un équilibre précaire entre ce qu'il est raisonnable de faire et l'ordre aussi abstrait que déraisonnable de la pulsion.


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Carolyn et Palek sont déjà en place - ils constituent proprement un couple mais leurs aspirations diffèrent pourtant au sujet des enfants. Pour elle, ceux-ci symbolisent un aboutissement et donc une suite logique. Les enfants se placent naturellement dans l'idée d'une preuve d'amour. Si tout fonctionne, ils se doivent d'être là puisqu'ils sont la réalisation de cet amour. Palek, dont le passé affectif semble avoir été un peu perturbé, pense son couple sur un autre mode et le vit au contraire comme une sphère autonome vis-à-vis du reste du monde et de sa propre famille. L'enfant apparaît alors comme un vecteur de perturbation et il voit la confirmation de cela à chaque instant,n que ce soit dans un magasin ou en observant la vie de ses amis. La naissance n'est pas la continuation d'un projet mais la fin d'un âge d'or.



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Katie et David sont un peu au début comme la confirmation de ce que pense Palek et semblent presque faire corps avec l'idée que la création de la famille est la fin du désir alors qu'au fil des épisodes ce nouvel événement doit plus se poser comme la reconquête d'un nouveau désir.



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Enfin May - la thérapeute - est comme la somme de toutes ces vies. Elle marque le point où le noeud s'est dénoué et où ces différents stades ont été dépassés. La vieillesse est alors présentée comme la véritable maturité - le moment où le désir est assumé pour ce qu'il est et c'est peut-être cela qui a pu paraître le plus dérangeant aux yeux des détracteurs de la série. Il semble difficile de concevoir, dans une société qui place tout dans l'apparence du corps, que c'est au moment où son âge d'or est passé que nous vivons le plus en paix avec. Sa vie n'est pas parfaite, des conflits demeurent - mais dans le fond ce qui en fait un personnage à part mais aussi le point de rencontre de tous les protagonistes c'est que, pour elle, la lutte est finie - ou plutôt elle a su trouver un juste équilibre entre tous ces problèmes.


Tell me you love me est donc à la fois la série la plus sombre tant le malaise des personnages est communicatif mais aussi celle qui annonce en l'exemplifiant une possible issue à tout cela. Elle n'est pas un divertissement en tant qu'elle saurait nous détourner de nos problèmes mais au contraire elle est ce qui nous force à y penser. Et c'est proprement cela qui fait son prix mais qui a aussi précipité sa perte puisque personne n'a jugé bon de pousser au-delà de la saison 1 ce douloureux mais nécessaire examen.



Ugo B.

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